L’ancien président du sénat Révérien Ndikuriyo a été élu dimanche 24 janvier 2021 nouveau secrétaire général du parti CNDD-FDD. L’homme connu pour ses discours qualifiés « de haine » par certains, succède à Evariste Ndayishimiye, actuel président de la République.
Révérien Ndikuriyo est connu pour être un des plus grands ténors du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, et les différents postes qu’il a occupés prouvent la considération que sa formation politique et ses membres lui vouent : depuis l’arrivée du CNDD-FDD au pouvoir, il a été gouverneur de Makamba dont il est originaire, président du Sénat, en même temps président de la Fédération du football du Burundi, FFB. Mais cet ancien rebelle, démobilisé au grade de Colonel, s’est surtout révélé aux yeux du monde par ses discours qu’une certaine opinion qualifie d’extrêmement violents, voire de haineux.
Son fameux « Kora » et sa prime pour abattre un homme
Les Burundais, comme le monde, se souviendront longtemps de son mot d’ordre « Kora » – signifiant littéralement « travaillez » – lancé en octobre 2015 aux administratifs des quartiers du Nord de la mairie de Bujumbura pour qu’ils exterminent les manifestants qui s’opposaient au 3ème mandat de Pierre Nkurunziza. Il a repris le mot « Kora » utilisé en mai 1994 par Théodore Sindikubwabo, alors président par intérim du Rwanda, appelant au massacre des Tutsis au mois de mai 1994 à Butare. « Vous les chefs de quartiers et autres administratifs à la base, n’attendez pas. Si un policier tire sur la jambe pour ne pas blesser mortellement, on vous demandera de travailler pour la sécurisation du quartier, faites-le en zéro seconde ». Comme récompense, il leur a promis les parcelles des victimes.
En septembre 2019, Révérien Ndikuriyo promet publiquement une prime à qui lui emmènerait la tête de Pascal Ninganza, alias Kaburimbo, un habitant de Matana et retraité des ex-Forces armées burundaises, accusé de collaborer avec des groupes armés. « Kaburimbo a semé le désordre. Lors de mon dernier séjour ici, j’avais demandé sa tête, mort ou vif. Cinq millions sont disponibles. Il est recherché. Lancez-vous dans la compétition pour le capturer. »
« Le système se renforce pour le pire », s’écrie l’opposition
Pour l’opposition, l’arrivée de Révérien Ndikuriyo à la tête du parti au pourvoir n’augure rien de bon. Pour Frédéric Bamvuginyumvira, président de la coalition CFOR Arusha, par exemple, « Il faut situer cette élection dans le cadre de la politique du CNDD-FDD. Depuis 2005 jusqu’aujourd’hui, cela fait déjà 16 ans, le CNDD-FDD s’est illustré dans l’implantation d’une politique propre à eux, c’est-à-dire une politique complètement opposée à l’Accord d’Arusha. Quiconque ose lever le doigt aujourd’hui est tabassé, menacé et même tué. L’élection de Révérien Ndikuriyo s’inscrit dans le prolongement du CNDD-FDD qui est opposé au salut du peuple burundais et qui garantit la perdition de ce peuple », a-t-il déploré.
Une élection qui n’a rien de surprenant
Même son de cloche du côté de la société civile indépendante. Pacifique Nininahazwe a dit ne pas être surpris par la désignation de Révérien Ndikuriyo. « Il semble que feu Pierre Nkurunziza et Evariste Ndayishimiye s’étaient entendus sur les noms des personnalités qui allaient occuper les principales responsabilités dans le pays. Révérien Ndikuriyo ne vient donc que compléter une équipe déjà préparée. Il n’y a pas de différence entre lui et Alain Guillaume Bunyoni à la tête du gouvernement, entre lui et Gervais Ndirakobuca qui occupe aujourd’hui trois ministères très importants, ou encore entre lui et Gélase Ndabirabe à la tête de l’Assemblée Nationale. Il s’agit de personnalités connues pour leurs propos violents, pour leur haine de l’opposition mais aussi pour une certaine haine ethnique. On les connait aussi comme étant des affairistes qui veulent s’accaparer des pans entiers de l’économie nationale. C’est une équipe qui a une même vision », a martelé Pacifique Nininahazwe.