Droits de l'Homme

Le déni des disparitions forcées par le pouvoir irrite au plus haut point la société civile

Publié le 30 juillet 2021 par Rédaction

Les autorités burundaises persistent et signent : après le Chef de l’Etat, c’est au tour du procureur général de la République d’affirmer qu’il n’existe pas de disparitions forcées dans le pays. C’était dans un point de presse ce mercredi. Pourtant, les enlèvements sont perpétrés par des agents de l’Etat, parfois en plein air devant les familles des victimes. C’est le constat de la campagne Ndondeza qui s’insurge ainsi contre les propos qu’elle qualifie de mensongers du procureur général de la République. Pacifique Nininahazwe, responsable de la campagne, demande au procureur d’indiquer aux familles des victimes où se trouvent les leurs.

Au cours de ce point de presse, le procureur général de la République, Sylvestre Nyandwi, a d’abord admis qu’il s’observe de l’insécurité dans certains coins du pays. Mais, selon le procureur, certains des auteurs sont en uniforme des corps de sécurité qui utilisent des véhicules qui n’ont pas de plaques. Il affirme que le parquet a déjà ouvert des dossiers et que des enquêtes sont en cours.

A propos des disparitions forcées, non seulement il nie une réalité que les défenseurs des droits de l’homme n’ont de cesse de décrier, preuves à l’appui, mais il précise en outre que les disparus ont rejoint les groupes rebelles, sans avertir leurs familles.

« Il y a un autre phénomène criminel dont il est fait état sur les réseaux sociaux ces derniers jours, il s’agit de celui de personnes kidnappées par des criminels qui se déguisent en forces de sécurité. Cependant, certaines de ces allégations de personnes disparues sont mensongères. Le cas illustratif est celui d’une personne répondant au nom de Toyi Pascal de Rutana, dont on avait annoncé l’enlèvement, mais que l’on a retrouvé dans un cachot de Makamba où il est en garde à vue, poursuivi pour des actes criminels qu’il aurait commis. De même, des personnes partent pour se faire enrôler dans des groupes armés sans en informer leurs familles, et celles-ci croient à tord qu’elles ont été enlevées », a affirmé Sylvestre Nyandwi.

Le procureur général de la Répubique a fait une affirmation gratuite, selon le FOCODE

Sylvestre Nyandwi, le procureur général de la République.

L’argument du procureur est loin de convaincre la société civile indépendante. Par exemple, pour Pacifique Nininahazwe, président du Forum pour la conscience et le développement, qui a initié la campagne Ndondeza, le patron de la justice burundaise ne cherche rien d’autre qu’à couvrir les criminels.

« Dans plusieurs cas, des agents des services de sécurité ont arrêté les victimes dans les familles, devant leurs proches. Dans d’autres cas, les victimes ont été arrêtées ou enlevées par des agents des services de sécurité en public, en présence de témoins. Ce qui m’intrigue dans l’argument de Sylvestre Nyandwi, c’est qu’il ne montre pas la moindre enquête qu’il aurait menée sur ces cas, pour en arriver à une telle conclusion. Et si ces gens n’ont pas informé leurs familles, est-ce qu’ils auraient dans ce cas informé Sylvestre Nyandwi ? S’il n’a pas mené d’enquête, comment a-t-il su où se trouvent ces victimes de disparitions forcées ? » s’interroge Pacifique Nininahazwe.

Au-delà des exemples donnés par le FOCODE, le parti CNL semble le plus visé par ces disparitions forcées, l’exemple le plus récent étant celui de Ngomirakiza Elie, enlevé, puis porté disparu depuis le 9 juillet 2021. Des témoins affirment que Ngomirakiza Elie a été kidnappé par le commandant du 221ème bataillon qui occupe la forêt de la Rukoko.

Le procureur rejoint ainsi la position du président Evariste Ndayishimiye. Le Chef de l’Etat avait en effet affirmé sur les médias français, France24 et RFI, que ceux qui ont été portés disparus se cachent au Rwanda, après avoir commis des crimes au Burundi.

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