Santé

Le pouvoir burundais devrait répondre un jour devant la justice pour non-protection du peuple contre le Covid-19

Publié le 7 août 2021 par Rédaction

Le Burundi reste le seul pays de la sous-région et le 2e dans toute l’Afrique à ne pas avoir mis en place une campagne de vaccination contre le Covid-19. De même, le gouvernement ne cesse de clamer haut et fort que la situation est maitrisée, au moment où des structures sanitaires à travers le pays crient ne plus pouvoir maîtriser une situation qui les dépasse, parce qu’ils sont débordés par un nombre de cas positifs toujours croissant. Cette attitude du gouvernement est considérée ni plus ni moins comme un crime contre son peuple par la société civile indépendante.

Le gouvernement, par le biais du ministère de la Santé, vient de publier son dernier rapport hebdomadaire.

Fait le plus marquant, le rapport du ministère fait état de deux flambées épidémiologiques dans les districts sanitaires de Kiremba en province de Ngozi avec 551 soit 28.95% et à Kirundo avec 496 soit 26.22% des cas testés positifs du 28 juillet au 3 août dans tout le pays.

Depuis la découverte du premier cas Covid-19 au Burundi en mars 2020, 426.056 personnes ont été dépistées. Parmi elles, il y a eu 7.931 cas confirmés positifs, dont 7.345 guéris, et 569 personnes actives encore sous traitement, dont 3 cas graves admis dans les hôpitaux de Kirundo et Kiremba. Le ministère de la Santé précise que, jusque-là, 10 personnes ont été emportées par cette pandémie.

Depuis novembre 2020, les publications des données sur le Covid-19 sont devenues sporadiques. Encore qu’elles n’ont jamais convaincu nombre d’observateurs, dont des spécialistes du domaine de la santé, les défenseurs des droits de l’homme et l’opposition, qui estiment que les chiffres livrés par le pouvoir sont de loin en deçà de la réalité.

Pire, les mêmes autorités viennent d’admettre l’entrée des vaccins contre le coronavirus offerts par la Banque Mondiale, mais annoncent dans la foulée que tous les vaccins, d’où qu’ils viennent, seront destinés juste à être stockés, et que le gouvernement n’entend aucunement prendre la moindre responsabilité pour vacciner la population.

« Une attitude criminelle contre son peuple », selon le CAVIB

Point de lavage des mains à Gatumba, au Burundi avec la République Démocratique du Congo © 2020 Onesphore Nibigira/AFP via Getty Images

Dans le contexte où les pays du monde entier s’activent dans la lutte contre le Covid-19, il est clair que le Burundi ne s’acquitte pas des obligations pour bien mener la lutte contre cette pandémie. Cela transparait dans une analyse du CAVIB, le Collectif des avocats pour la défense des victimes des crimes de droit International commis au Burundi. Me Emmanuel Nkengurutse, du collectif, explique qu’il y a des obligations non tenues par les autorités burundaises, notamment des mesures-barrières contre le virus et la campagne de vaccination mondiale contre la pandémie. Maitre Nkengurutse trouve que c’est un crime contre le peuple burundais pour lequel le pouvoir pourrait un jour répondre devant la justice.

« Si on analyse le budget de l’année en cours, qui a été voté après l’éclatement de la pandémie au Burundi, nous constatons que le budget affecté à la santé est de 2,2% uniquement, pendant qu’il s’accroît de 40,1% pour les services de la présidence la République, de 30,3% pour la tête de l’exécutif et de 17,7% pour le Parlement. Cela ne peut être interprété autrement qu’un manque de volonté qui constitue une atteinte au droit à la santé. Le devoir des Etats de vacciner la population contre les principales maladies infectieuses et de prévenir et maitriser les épidémies est une obligation prioritaire, au regard du droit à la santé. Nous constatons au Burundi un manque de volonté de vacciner la population. L’autre obligation violée, c’est celle d’édicter et de faire respecter des mesures de santé publique pour barrer la contamination et la propagation, notamment le port des masques, l’hygiène des mains et la distanciation physique. L’étude du CAVIB attire l’attention du gouvernement sur les conséquences de son refus d’agir qui, en cas de survenance de malheur public, pourraient faire engager la responsabilité internationale de l’Etat burundais et la responsabilité pénale individuelle des membres de ce gouvernement », prévient Emmanuel Nkengurutse.

Le CAVIB recommande aux autorités burundaises, particulièrement au Président de la République, de se joindre aux programmes mondiaux de lutte contre la pandémie comme recommandé par l’Organisation mondiale de la santé.

« Nous recommandons au gouvernement de prendre la pandémie au sérieux et de cesser les atteintes au droit à la santé. La lutte contre cette épidémie doit revenir au gouvernement qui, constitutionnellement, est redevable envers le peuple. Cette lutte contre le Covid-19 doit se faire sous la direction du président de la République. Enfin, aucun prétexte de manque de moyens n’est à évoquer, car pour la lutte contre une pandémie mondiale, le mécanisme de l’assistance de la coopération internationale contribue à l’accroissement des ressources disponibles à l’interne, comme le confirment les mécanismes mis en place par l’OMS », indique Me Emmanuel Nkengurutse.

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