Affaire de détournement de fonds dans la commune Kiremba de la province Ngozi. Une situation où l’administrateur de cette commune est pointé du doigt comme étant l’acteur principal. Il a été contraint de restituer les immeubles et les terres appartenant à la commune qu’il avait vendus. C’est suite à une mesure prise par le gouverneur de la province Ngozi samedi dernier, lors d’une descente effectuée dans la commune Kiremba. Certains habitants de Kiremba et quelques conseillers communaux estiment que le gouverneur a été trop clément à l’endroit de l’administrateur. Un avis que ne partage pas Frédéric Bamvuginyumvira, ancien Vice-président de la République, pour qui seule la loi doit dicter la démarche à entreprendre.
C’est au cours d’une réunion animée à Kiremba par Emmanuel Ntaconsanze, gouverneur de la province Ngozi en fin de semaine dernière, que celui-ci a ordonné la restitution à la commune des maisons et une propriété de la coopérative Akanovera qui avaient été unilatéralement vendues par Pascal Sebigo, l’administrateur de la commune Kiremba.
« A propos du terrain de la commune situé à Kagarama qui avait été donné à un certain Blaise Sentore, la solution avait été trouvée, parce que le ministre de l’Agriculture et de l’élevage avait déjà exigé à l’administrateur de restituer ce terrain à la commune. Pour ce qui concerne les maisons appartenant à la coopérative Akanovera, leur acquéreur, Clément Nkurunziza, doit les restituer à la commune. Il nous reste à récupérer le titre de propriété que l’administrateur a hypothéqué à la COOPEC par la voie judiciaire. Il a menti à la COOPEC en lui donnant ce titre comme hypothèque. Nous voulons faire retourner à l’Etat, tout ce qu’il a illégalement cédé ou vendu. Nous comptons remettre les choses sur les rails », a détaillé le gouverneur.
Au cours de cette réunion du gouverneur, l’administrateur Pascal Sebigo a également été nommément accusé d’autres actes malveillants par ses administrés : injustice, faire fi du rôle de la commission finances de la commune, octroi des marchés gré à gré, monopole du commerce des produits BRARUDI, etc.
« L’administrateur et le secrétaire du parti CNDD-FDD se sont adjugés le monopole du commerce des produits BRARUDI ici. Les autres citoyens ne sont pas approvisionnés. Quand ces produits arrivent, ils sont tous acheminés vers les bistrots de ces deux responsables. Autre chose, moi par exemple, j’ai acheté des terrains, et je viens de passer une année et demie à la recherche des documents administratifs à la commune, mais l’administrateur a refusé de me les donner. Il m’accuse d’avoir volé les citoyens alors que personne n’est jamais venu faire opposition. Nous sommes fatigués, nous avons besoin de souffler, monsieur le gouverneur. Nous voulons manifester notre mécontentement, nous rentrons la peur au ventre lorsque nous venons d’une réunion qu’il vient d’animer, alors que nous sommes des leaders. Il nous exige à chaque fois qu’il prend la parole de l’acclamer. Et gare à celui qui ne le fait pas », a témoigné un habitant de la commune pendant la réunion avec le gouverneur.
Mais pas que ! Puisque le même Pascal Sebigo est aussi accusé de détournement du ciment qui était destiné à la construction d’une école fondamentale. Le gouverneur a alors exigé la reprise des activités de construction qui avaient été suspendues à cause du manque de matériaux.
Néanmoins, certains habitants de Kiremba présents dans la réunion ont manifesté leur soutien à l’administrateur, mais ils ont été hués par la foule.
« Quel est l’avantage de démettre l’administrateur ? Ceux qui veulent son remplacement devraient d’abord demander à la population son avis. Et non aller tromper les hauts dirigeants du pays. Notre administrateur est au service de la population, et s’il ne reste pas, ce sera un problème », a estimé un des habitants favorables au maintien de l’administrateur à son poste.
Selon des sources à Kiremba, Pascal Sebigo jouirait de la protection des grands ténors du parti CNDD-FDD dont il est issu. Pour ces sources, il serait donc difficile de penser qu’il soit éjecté de son poste en raison de sa méconduite.
Pour rappel, le 9 juillet, le président Evariste Ndayishimiye avait ouvertement réprimandé l’administrateur pour ces détournements, et exigé que les biens détournés soient restitués à leurs vrais propriétaires. Le chef de l’Etat, qui était alors en visite à Ngozi, avait instruit le gouverneur de prendre la question en main.
Seule la loi doit être appliquée
De son côté, Frédéric Bamvuginyumvira, ancien Vice-président de la République, estime que le gouverneur de Ngozi a bien fait son travail lors de cette descente, en ne prenant pas immédiatement la décision de destituer l’administrateur de la commune de Kiremba.
« Il faut être clair. Dans un Etat organisé, c’est la loi qui doit être respectée. Il doit être écrit au niveau de la loi communale comment on élit un administrateur et comment on le dégomme au cours de l’exercice de ses fonctions. Ce qui a été bien fait, c’est que le président de la République n’a pas décidé de le destituer sur le champ. Cela dénote déjà d’une évolution. Deuxièmement, c’est que le gouverneur s’est rendu sur place pour écouter l’intéressé et la population. Et il a été constaté qu’il y a une partie de la population qui soutient l’administrateur, et une autre qui est pour la bonne marche de la commune. Un administrateur doit respecter la loi. S’il agit contre la loi, c’est celle-ci qui doit être analysée, et la décision doit être prise à partir de là. Le gouverneur ne peut donc pas lire la loi sur le terrain. En fait il a fait un constat, il va donner son rapport au président, comme il l’a déjà promis. Et à partir de là, on peut donner des directives, pour que l’administrateur soit destitué ou pas, en fonction de la gravité des fautes commises. La question n’est donc pas le fait qu’il soit soutenu ou pas par la population, mais le respect ou le non-respect de la loi », insiste l’ancien vice-président de la République.