L’appel de la campagne Ndondeza est sans équivoque. Elle attire l’attention des familles de personnes enlevées pour oser le signaler à temps. Cet appel survient dans un contexte où de nombreuses personnes sont portées disparues ces derniers jours.
Pour la campagne Ndondeza, c’est primordial d’alerter dès le moment des faits. Pacifique Nininahazwe, président de cette campagne, précise que lorsque les proches attendent trop longtemps pour alerter sur l’enlèvement des leurs, cela donne aux agents du Service national des renseignements le temps de faire ce qu’ils veulent de la personne kidnappée, jusqu’au pire.
« C’est très important d’alerter dès le moment même de l’enlèvement. Mais nous constatons de plus en plus qu’il y a des familles qui hésitent à lancer des alertes, en se disant qu’en lançant l’alerte, ils risquent de faire croire que la personne enlevée est complice de la publication de l’alerte. Ce qui n’est pas le cas, c’est une façon de se tromper. Parce que lorsque les familles attendent beaucoup de jours avant d’alerter sur l’enlèvement des leurs, elles donnent plutôt du temps au service de renseignements, de torturer sans être perturbé, la personne enlevée, mais aussi, le cas échéant, le temps de la tuer, sans difficulté », signale le défenseur des droits humains.
Pour Pacifique Nininahazwe, une alerte précoce ne présente, au contraire, que des avantages.
« Or lorsqu’il y a une alerte dès l’enlèvement, cela met la pression sur le service de renseignements et sur les personnes qui ont enlevé la personne. C’est très important que dès le moment où la famille, des proches ou des témoins, ont connaissance de l’enlèvement d’un citoyen, qu’ils communiquent immédiatement sur l’identité de la personne enlevée, sur le nombre et l’apparence des personnes qui l’ont enlevée, sur le véhicule qui a été utilisé : sa couleur, sa marque, son numéro d’immatriculation. Ces informations sont essentielles dans les toutes premières heures. Parce que ces informations font que les auteurs de l’enlèvement apprennent qu’ils ont été identifiés, et prennent ainsi peur. Quand c’est communiqué de cette façon, c’est rare que les victimes soient tuées. Elles sont, dans la plupart des cas, plutôt présentées devant le parquet et amenées à la prison », défend le président de la campagne Ndondeza.
Cet appel survient également quelque temps après ce qui a semblé être une véritable campagne de déni de l’existence des disparitions forcées, par les autorités au plus haut niveau. A commencer par le président de la République, Evariste Ndayishimiye, qui a affirmé, sans sourciller, sur les médias français RFI et France 24, qu’il n’y a pas de disparus au Burundi, que ce sont des criminels qui vont se cacher chez le voisin du nord, le Rwanda. Une affirmation reprise par le procureur général de la République, Sylvestre Nyandwi qui, lui, a indiqué qu’il s’agit de personnes qui ont rejoint des groupes armés, sans avoir averti leurs familles.