Gouvernance

Une sangsue interne ruine l’ONATEL

Publié le 1 juin 2022 par Rédaction

ONAMOB ! Un mal plus qu’un bien. Le projet d’extension et de modernisation du département de téléphonie mobile de l’Office national des télécommunications (ONATEL), ONAMOB qui a couté 30 millions de dollars américains n’était finalement qu’un leurre. C’est du moins ce que constate avec regret le personnel de l’ONATEL. Ce personnel révèle que le marché de gré à gré conclu a été émaillé de nombreuses irrégularités. Cinq ans après le début du projet, ni l’Etat du Burundi, ni l’ONATEL, personne ne dispose d’un rapport détaillé sur le projet.

En 2017, l’Etat du Burundi s’est porté garant devant l’entreprise chinoise Huawei pour que cette dernière donne un prêt de 30 millions de dollars américains à l’Office national des télécommunications. Cet argent était destiné à l’extension et à la modernisation du département de la téléphonie mobile ONAMOB.

Selon les prévisions, ONAMOB devait engranger des recettes de 300 millions de francs burundais par mois, une fois mis en marche. Mais le personnel de l’ONATEL indique que ce projet a été mal étudié, parce que ledit marché a été donné gré à gré à l’entreprise Huawei,  en contournant ainsi la voie normale de la passation des marchés publics par appel d’offre.

Aujourd’hui, cela fait cinq ans, et le projet n’a toujours pas vu le jour. Et les conséquences de cette opération pèsent lourd sur l’entreprise. Ainsi, toutes les recettes de l’ONAMOB sont directement versées sur un compte dit « compte-séquestre » ouvert à la BANCOBU par le ministère des Finances, pour servir uniquement au paiement du prêt de Huawei.

Le département ONAMOB est aujourd’hui considéré comme un parasite, parce qu’il ne fonctionne que grâce à des recettes tirées des autres départements.

« L’étude de faisabilité de ce projet a été mal faite. Il est clair que l’ONAMOB a raté sa modernisation et son extension. Ce département ne fait pas rentrer de recettes à l’ONAMOB et, personnellement, je considère le projet comme mort-né. Ce marché a été offert gré à gré à Huawei, donc sans appel d’offre comme se fait normalement une passation des marchés publics de ce niveau. Les conséquences sont énormes. Il y a un compte dit compte-séquestre qui a été ouvert à la BANCOBU, sur lequel, doit être directement versé toutes les recettes de l’ONAMOB. La BANCOBU reverse à son tour le tout à Huawei, sans réserver aucun franc pour l’ONATEL. Ce compte sera fermé aussitôt que le paiement est terminé. L’ONAMOB est aujourd’hui considéré par le personnel comme un monstre qui dévore les recettes de l’ONATEL », regrette un responsable syndical de l’entreprise.

Dans le document récemment rendu public par le personnel de l’ONATEL, cette question ONAMOB-Huawei est citée à la neuvième page. Les travailleurs soupçonnent que les 30 millions de dollars américains n’ont pas été utilisés dans leur totalité pour ce pourquoi ils ont été contractés, car, selon eux, il n’existe pas de matériel de cette valeur à l’ONATEL.

Autre facteur d’inquiétude, la société tunisienne qui avait gagné le marché de surveillance de l’exécution du projet est partie sans avoir donné son rapport.

« Nous nous inquiétons et doutons que ces trente millions de dollars américains n’ont pas été utilisés comme initialement prévu. Et c’est d’ailleurs la raison de l’absence du rapport de l’exécution du projet, cinq ans après. La société tunisienne de surveillance SFM Technologies est partie avant la fin du projet et sans donner de rapport à l’Etat du Burundi. Jusqu’à présent, personne ne pourra dire exactement combien Huawei a donné à l’ONATEL. Cet argent n’est visible nulle part », explique le même syndicaliste.

Dans nos éditions ultérieures, nous vous ferons découvrir pourquoi cette société tunisienne est partie sans avoir terminé son travail, et pourquoi l’Etat du Burundi ne semble pas se soucier de ce départ.

Pour rappel, le gouvernement burundais, jusqu’au chef de l’Etat, accuse sans cesse le personnel de l’ONATEL d’être à l’origine de sa faillite, en disant qu’il a consommé et le capital et les intérêts de l’entreprise. En réponse, le même personnel vient de sortir un document intitulé « Contributions du personnel de l’ONATEL », dans lequel il démontre l’entière responsabilité de ce même Etat. Les autorités n’ont jusqu’aujourd’hui apporté aucun démenti.

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